TEMOIGNAGE. Covid-19 : decouvrir un test positif le jour de son vol, “un coup de massue” pour cette Ivoirienne

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C’est le cauchemar de tous les voyageurs qui empruntent les airs : decouvrir a quelques heures du decollage qu’ils ne peuvent pas prendre leur avion parce qu’ils ont ete infectes par le Sars-Cov-2, le virus responsable du Covid-19. C’est la desagreable experience vecue a l’heure du retour par Regine Yao, une Ivoirienne de 39 ans residant en France, qui s’est rendue en Cote d’Ivoire pour les fetes de fin d’annee.

“J’ai fait mon test Covid deux jours avant mon voyage. J’attendais mon resultat pour le jour du depart, prevu le 8 janvier 2021″, raconte Regine Yao. Un scenario assez commun compte tenu des exigences des transporteurs et le delai de traitement des prelevements. Entre l’Europe et l’Afrique, notamment, les compagnies aeriennes exigent que les passagers presentent un test negatif effectue moins de 72h avant le depart et les delais des laboratoires sont de 48h maximum pour donner le resultat des analyses.

Confiante, Mme Yao ne se doute pas de la mauvaise surprise qui l’attend le jour de son depart. “Dans la matinee, je me connecte au site dedie (c’est la procedure en Cote d’Ivoire pour les tests Covid, NDLR) et j’entre mon code de prelevement, mais je n’ai pas d’information. Il est juste ecrit : ‘Merci de respecter les gestes barrieres. Nous vous recontacterons.’ Pour moi, c’etait juste une question de temps avant d’avoir mon resultat. Entre temps, je me preparais puisque mon voyage etait prevu pour le soir quand j’ai recu un appel m’informant que mon test etait positif et que je ne pouvais donc pas voyager. Il etait environ 19h30 (GMT) et j’etais en route pour l’aeroport. C’etait vraiment un coup de massue parce que ma famille allait repartir sans moi. Je ne pouvais pas imaginer un seul instant que j’etais infectee parce que je n’avais aucun symptome. Tout allait bien quand je suis allee faire mon test. En outre, personne n’etait visiblement malade autour de moi. Au final, je n’ai pas pu voyager avec mon epoux et ma fille.”

Sans “aucune difficulte”, la compagnie annule son billet. “J’ai juste explique la situation”. Si une partie de la logistique est reglee, Regine Yao doit penser a se faire soigner. Durant le fameux appel telephonique, des recommandations lui sont faites. “Ils m’ont demande si j’avais des symptomes. Si c’etait le cas, je devais me rendre au centre de prise en charge au CHU deTreichville (un des principaux centres hospitaliers de la capitale ivoirienne Abidjan, NDLR), a savoir le Service des maladies infectieuses et tropicales (SMIT). Sinon, je devais rester bien confinee chez moi. Il se trouve que j’ai commence a ressentir certains symptomes comme la perte de l’odorat et celle du gout. Le samedi 9, je me suis donc rendue au centre, vers 16h (GMT) et j’ai ete agreablement surprise qu’il soit ouvert le week-end. J’ai eu une prescription et la plupart des medicaments m’ont ete donnes sur place. J’ai rencontre un medecin, tres a l’ecoute, a qui j’ai confie mes antecedents medicaux. Le traitement s’etendait sur environ cinq jours et on m’a donne rendez-vous pour le samedi suivant.”

Regine Yao recoit alors une longue liste de medicaments. Elle ne se souvient plus d’ailleurs a quoi certains ont servi. “Je ne les connaissais pas a l’exception d’un antibiotique, le seul medicament que j’ai du d’ailleurs acheter en pharmacie parce qu’il n’etait pas disponible au centre, confie la jeune femme. On m’a egalement prescrit un traitement cense eviter les coagulations, les caillots de sang que peut provoquer le virus. Il etait a prendre au coucher. J’ai aussi eu de la vitamine C, histoire de renforcer mon systeme immunitaire. J’avais encore deux autres medicaments et un antiretroviral. Je n’ai pas pris ce dernier.”

Plus tard, outre la perte du gout et de l’odorat, Regine Yao ressent d’autres symptomes connus de la maladie. “Je n’avais plus d’appetit et j’etais fatiguee. Une fatigue que j’ai plutot associee a tous les deplacements effectues durant les deux semaines precedant la decouverte de l’infection. En plus, il faisait tres chaud et je pense que ca a contribue a ma fatigue. Je n’ai pas pas panique et je me suis dit que ca irait avec le traitement. Autrement, je n’ai pas eu de fievre, pas de cephalee. Je n’ai pas tousse ni eternue.”

Pendant son confinement, qu’elle respecte a la lettre a Abidjan, Regine Yao contacte son medecin traitant et son employeur France. “J’ai eu mon medecin au telephone et je lui ai explique la situation. Je lui ai transmis l’attestation qui indiquait que j’etais infectee et il m’a fait un arret de travail que j’ai envoye a mon entreprise pour justifier mon absence. J’ai egalement envoye un message a la responsable de mon service pour l’informer de mon etat de sante.” Comme elle en Cote d’Ivoire, sa famille sera confinee en France. “Ma fille qui a 5 ans n’a pas fait de test. Mais a son retour, son pere et elle sont alles voir le medecin qui a estime que ce n’etait pas necessaire de le lui faire faire. Neanmoins, les deux ont ete confines pendant une dizaine de jours.”

De son cote, en Cote d’Ivoire, Regine Yao se rend a son rendez-vous de controle une semaine apres la decouverte de son infection. “Le 16 janvier 2021, j’ai refait mon test et j’ai obtenu mon resultat negatif deux jours plus tard dans la matinee, le 18 janvier. Je me suis tout de suite rendue a l’agence ou j’ai pu obtenir sans probleme une place sur le vol qui decollait le soir meme. Ma destination finale, c’etait Lyon, mais je n’ai pas hesite a changer pour Paris parce qu’il n’y avait pas de correspondance. Je pouvais poursuivre mon voyage en train. L’idee etant de rentrer le plus tot possible et de ne plus prendre aucun risque.”

Des risques, elle estime n’en avoir pas pris meme si elle a contracte le virus et deplore un certain relachement dans son pays natal. “Je ne me suis pas relachee mais j’ai l’impression que la majorite des gens ne croient pas en l’existence de la pandemie liee au Covid en Cote d’Ivoire. Les gens que je connaissais me rabachaient tout le temps qu’il n’y avait pas de Covid ici parce que je gardais mon masque. On me disait : ‘Le Covid, c’est chez vous en Europe, ca vient de l’Occident.’ La maladie est pourtant la. J’ai ete contaminee a Abidjan, meme si je ne sais pas comment, puisque je n’aurais pas pu voyager si mon test avait ete positif au depart de la France. Quand on emprunte les transports en commun ou les taxis, les chauffeurs n’ont pas de masque. J’en ai offert a maintes reprises a plusieurs d’entre eux. Il y a un relachement dans le respect des gestes barrieres. C’est quand meme choquant de voir cela. J’estime que c’est de l’inconscience et de la negligence.”

A contrario, Regine Yao note le serieux affiche dans le controle aeroportuaire. “Sur l’attestation Covid, il y a un QR Code qui permet de verifier l’authenticite du document presente par le voyageur. Son attestation est comparee a ce qui est disponible dans la base de donnees consultee par les agents de l’Institut d’hygiene en charge du controle des voyageurs avant qu’ils ne penetrent dans la salle d’enregistrement a l’aeroport d’Abidjan. J’ai vraiment apprecie le dispositif dans la mesure ou il y a habituellement cette facilite de falsifier les documents. Le controle des tests a l’aeroport est un filtre qui empeche les voyageurs de s’enteter quand ils sont malades et qu’ils n’ont pas encore leurs resultats, et donc pas d’attestation. Plusieurs d’entre eux ont du rebrousser chemin a l’issue des controles quand j’y etais. Celui qui controlait les attestations etait tres intransigeant.”

Elle salue egalement la qualite de la prise en charge dont elle a fait l’objet. “Le medecin qui m’a recu etait tres rassurant. Tout le monde etait a l’ecoute”. Cependant, regrette-t-elle, “on n’a aucune information quand le test est positif au niveau du site dedie et aucun numero de contact. On vous dit juste de respecter les gestes barrieres. Une amie qui est malade a Abidjan et qui a fait son test a recu le meme message que moi. Je lui ai explique qu’elle etait surement infectee si elle l’avait recu. C’est dangereux de laisser les gens dans l’incertitude car ils peuvent sortir de chez eux ne sachant pas qu’ils sont positifs.”

Un dizaine de jours apres cette desagreable experience, Regine Yao a rejoint sa famille a Lyon. Je me sens tres bien aujourd’hui. Je reprends le travail le 25 janvier et tout va bien. Je pense que le traitement a fait son effet. Je ressens juste un peu de fatigue mais rien de mechant. Le fait d’avoir pris de la vitamine C a certainement contribue a me remonter. Je prenais egalement des oranges tous les matins pendant mon confinement. La, je me sens vraiment bien.”